Créée en 1997 par un chimiste et sa femme qui avaient envie d’une autre vie et ont craqué sur une vieille ferme en briques rouges, la brasserie Northmaen se visite tous les samedis à 15h30. Cette visite est bien sûr suivie d’une dégustation de quantités de bières différentes ; ainsi que de Whisky, vous verrez pourquoi un peu plus tard. Arrivés vers 15h30 donc, nous y sommes restés jusqu’à quasiment 19h, preuve que la visite fut réussie !
Voici quelques unes des informations que nous avons réussi à retenir à propos de la fabrication de la bière :
La récolte
La matière première pour faire de la bière est l’orge. La brasserie dispose de 10ha entièrement dédiés à la culture de cet orge. Le rendement est de 80 quintaux à l’hectare en moyenne. La bière Northmaen n’est produite qu’avec cet orge, d’où son appellation de bière “fermière”.
Le maltage
Une fois récolté, l’orge est d’abord stocké puis envoyé dans une malterie à Pithiviers. La brasserie ne réalise pas directement cette opération car celle-ci demande un équipement important. Cette malterie n’est pas la plus proche mais leur garantit que leur orge ne sera pas mélangé à d’autres, ce qui assure la traçabilité de leur produit. L’opération consiste à humidifier les grains d’orge afin de déclencher la germination et donc la production d’amidon, ingrédient clé pour la suite. Une fois que les germes atteignent environ 3 mm, les grains (qui prennent alors l’appellation de “Malt”) sont passés au four pour stopper le processus afin que la graine ne se nourrisse pas de l’amidon ainsi produit pour pousser. Cette opération s’appelle la torréfaction. Les températures de torréfaction sont cruciales. En effet, un malt moins cuit donnera des grains clairs et donc une bière blonde, tandis que le malt plus torréfié donnera des grains foncés pour faire de la bière brune. Le malt “Pilsen” est ainsi chauffé à 80° et sert de base aux bières blondes, le malt Pilsen caramel est chauffé à 120° pour les bieres rousses, le malt brun est torréfié quant à lui à 180°. Les bières ambrées, à la différence des bières rousses, sont des bières blondes (pilsen chauffé à 80°) auquel on rajoutera du caramel. Le blé peut également être passé au four. Mélangé à l’orge, il servira de base aux bières blanches. Cette succession d’opérations s’appelle le maltage.
Le brassage
Une fois revenu à la brasserie, le malt est concassé (il ne faut toutefois pas en faire de la farine) puis transféré dans une cuve et mélangé à 4000 litres d’eau chauffée à 30 ° (compter 1 à 1,5 tonnes de malt pour cette quantité d’eau). Un système intégré à la cuve permet de mélanger le malt et l’eau pendant 3h. Ce mélange prend le nom de Maische ou brassin (c’est aussi le nom de la cuve). Le brassin est transféré dans une seconde cuve puis filtré. Le résidu, la drêche, est ensuite donné aux ovins et bovins de l’exploitation car réputé pour augmenter la lactation.
La saccharification
Le brassin est retransféré dans la première cuve pour y être chauffé à différentes températures. L’amidon se transforme sous l’effet de la chaleur en sucres fermentescibles : 10 minutes à 35 ° pour l’arôme, 10 minutes à 50° pour la mousse, et 30 minutes à 75° pour l’alcool.
Le houblonnage
C’est à cette étape (lorsque l’eau est à 75°) qu’est ajouté le houblon. Ce dernier est infusé dans le mélange, comme pour une tisane ! Le houblon est une plante grimpante dont on récupère les chatons donnant les arômes et l’amertume à la bière. Il améliore aussi la conservation de la bière. Si on écrase les fleurs de houblon, on peut voir au centre une sorte de pollen jaune qui sent plutôt bon : la lupuline. C’est elle qui apporte l’amertume au mélange. La brasserie possède une dizaine de pieds mais qui restent essentiellement décoratifs. Le houblon utilisé pour la fabrication de la bière est acheté à un fournisseur sous forme de granulés concentrés. Il faut environ 10 kg de houblon pour un brassin de 4000 litres. Si on ne met pas de houblon dans le brassin, on obtient de la cervoise, et non pas de la bière. La cuve n’étant pas totalement hermétique, il peut arriver que des levures sauvages (bactéries lactiques) viennent “polluer” le brassin. Cela donne alors la “Gueuze” (et non pas Gueuse comme je croyais). Les Belges en ont fait un produit à part entière.
La fermentation
Le brassin est ensuite transvasé dans une nouvelle cuve, hermétiquement fermée : le fermenteur. Pour diminuer sa température à 23°, un circuit de refroidissement à eau est utilisé. La levure est ensuite ajoutée et la fermentation commence. La température augmente peu à peu pour atteindre environ 28°. La levure utilisée pour déclencher la fermentation ressemble à celle utilisée par les boulangers. A ce stade, l’odeur dans la salle est donc très proche de celle d’une boulangerie (miam !). Cette levure permet de transformer le sucre en alcool. Quand la température commence à redescendre, la fermentation est coupée : la température est descendue à 3° (toujours à l’aide de tuyaux refroidis au contact d’une eau très froide). Le brassin reste alors en cuve de fermentation pendant environ 3-4 semaines, la garde. La brasserie dispose de plusieurs cuves de fermentation, ce qui leur permet d’assurer un roulement et donc une production en continu, tout au long de l’année.
Le conditionnement
Au bout de 3-4 semaines, la bière est alors mise en fûts ou en bouteilles. L’appareil permettant de réaliser cette opération ne permet de remplir que 6 bouteilles à la fois. La bière étant très froide, le travail à ce stade est assez pénible (mettre en bouteilles et fermer par une capsule, bouteille par bouteille). La brasserie a récemment investit dans une machine à nettoyer les fûts. Avant cela, tous les fûts utilisés devaient être dépressurisés, nettoyés à l’eau, nettoyés à la soude, puis re-nettoyés deux fois à l’eau. Chaque fût ( plus de 10 kilos) étaient ainsi retourné plusieurs fois, l’opération étant répétée sur des centaines de fûts ! Les bouteilles sont quant à elles remises temporairement en chambre chaude pour relancer la production de bulles.
La distillation
Maintenant, pourquoi avons nous aussi goûté du whisky dans cette brasserie ? Il s’avère qu’il y a quelques années, des bactéries lactiques sont venues polluer un de leur brassin. Pour ne pas jeter les 4000 litres, ils ont demandé aux douanes ce qu’ils pouvaient en faire. Les douaniers leur ont suggéré de le transformer en whisky car la base (le malt) est la même pour ces deux productions. Ils ont fait venir un bouilleur de cru, mais leur premier whisky avait goût de… pomme. Ils ont donc fait par la suite l’acquisition de leur propre alambic. Le brassin est maintenant destiné dès le départ à la production de whisky : ils n’ajoutent pas de houblon et montent la température du brassin directement à 72° plutôt que de la monter par paliers. Le whisky est ensuite conservé trois ans minimum pour obtenir l’appellation.
La distribution
La bière produite à la brasserie est livrée par leurs soins. Leurs principaux clients sont les bars et restaurants de la région, les associations de tous genres (surtout étudiantes), les clubs de rugby, etc. La brasserie se réclame d’ascendance Viking et organise chaque année une fête viking dans les champs de l’exploitation. En juin dernier, 2800 personnes se sont ainsi données rendez-vous durant un week-end entier, lesquels ont vidés pas moins d’une centaine de fûts de bière (environ 3000 litres!) !
La dégustation
Et la dégustation me direz vous ? Et bien nous avons eu la chance de ne faire la visite qu’avec 3 autres personnes, ce qui nous a laissé tout le temps de poser des questions, puis de goûter plusieurs bières, accoudés à un petit bar maison : ambrée, rousse, blonde, brune, blanche (à la coriandre), à la châtaigne, au miel, et une cuvée spéciale mélangeant un peu tout (coriandre, orange, châtaigne, miel), et bien sûr, une larme de whisky. Les bières sont rondes et douces, tout comme le whisky, qui surprend par sa douceur et qui n’a de “Thor Boyo” que le nom. Une vraie réussite ! Nous avons donc été de bons clients, et notre hôte, très commerçante, nous a fait de nombreux cadeaux (Bière de Noël à l’orange, vinaigre ‘Aigrette” de bière, etc.).
5 commentaires
Rédigé par mayero le 20 septembre 2012
voila un reportage bien complet. Philippe devrait être bien intéressé.Nous attendons les phoyos. Merci camille.
Rédigé par celine le 27 septembre 2012
salut les petits loups,
c'est sur ca donne envie d'y aller et de gouter aux bieres... hmmm...ca me donne l'eau a la bouche ;-)
mais vraiment j'ai apprecie de lire votre billet, et ca me donne vraiment envie d'aller un jour avec philippe chez Ivan pour voir comment ils s'y prennent...
bon alors la, je suis sur que nini, tu es entrain de rever un peu non?...
bisous
Rédigé par mayero le 20 octobre 2012
les photos sont sympas et parlantes. Merci de les avoir rajoutées.
Rédigé par mayero le 20 octobre 2012
j'ai oublié de signaler que j'ai travaillé dans une brasserie pendant deux mois quand j'étais étudiant: un des boulots les plus pénibles que je connaisse.
Rédigé par Nico le 19 novembre 2012
A chaque fois que l'on sort l'une de leur bouteille, nos papilles nous rappellent à quel point nous avions apprécié notre visite, et la dégustation ;-)
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